jeudi 3 mai 2012

Premier Mai


La foire à l'outil à Bièvres était riche et vivante, cette année encore. On y a même vu quelques amis politiques, invités par notre Maire ; dont Maud Olivier. Eh oui, il est possible de rester courtois, même entre adversaires politiques.

Le Trocadéro est-il plus grand que l'on croyait ?

Chiffres. On entend dire que les soutiens de NS étaient deux cent mille place du Trocadéro, statiquement bien sûr. Si vous regardez sur votre plan de Paris ou sur Google-maps la surface de la place du Trocadéro, vous trouverez un cercle de moins de cent mètres de diamètre, soit une surface de moins de huit mille mètres carrés ; le parvis fait moins de 1,1 hectares, l'ensemble fait donc moins de deux hectares, soit 20 000 mètres carrés. S'ils étaient 200 000, cela fait plus de dix personnes par mètres carrés. Ils ne devaient pas avoir froid. Ils n'ont surtout pas froid aux yeux pour dire n'importe quoi.

La manifestation traditionnelle organisée par les syndicats

J'y suis allé ; pas comme toujours, mais comme parfois, notamment lorsque les enjeux poussent à la mobilisation plus que d'ordinaire.
Chiffres ? Ayant passé le plus clair de mon temps sur un lieu de rassemblement du PS (près du Métro Port-Royal) après être arrivé à Denfert, j'ai pu constater qu'à seize heures, la Place Denfert-Rochereau était encore immobile et qu'à dix-neuf heures, la queue de la manifestation (avec une discrète présence policière et une majestueuse présence de camions de nettoyage de la Mairie) était encore loin. Dans ma modeste expérience, quand ça se passe de cette manière, il y a nettement plus de cent mille personnes. Peut-être beaucoup plus. J'entends dire plus de trois cent mille.
Ambiance ? Des corps abîmés, des corps rayonnants, des corps ordinaires. Des visages calmes le plus souvent, généralement avec une forme de joie – la joie de ne pas se sentir seul, les manifs servent aussi à ça – reflétant souvent l'espoir, souvent la détermination, parfois une tension.
Participants affichant une appartenance ou une proximité politique ? Surtout des références aux syndicats, mais aussi des références à des mouvements politiques de gauche, parfois des références à des mouvements modestes mais connus comme Attac ou Roosevelt 2012, parfois des mouvements de pays en souffrance ou en espérance (l'un n'exclut pas l'autre) comme la Tunisie, parfois des mouvements OVNIS, en tous cas pour moi.
Mots d'ordre ? Revendications : être moins plumés, arriver en bon état à la retraite, se soigner, se loger, égalité des genres/sexes. Slogans politiques aussi : du genre Sarko casse-toi pour beaucoup, des François Président (nettement moins), des chants, slogans ou des discours racontant la casse sociale, d'autres exprimant la nécessité que François Hollande, s'il est élu, ne déçoive pas, et ceci sur tous les tons : évidents, craignant mais espérant, désabusés, rageurs, convaincus ; et même appliqués.
Contacts ? On voit des habitants de beaux quartiers traversés regarder les militants, rassemblements et drapeaux de la CGT avec quelque effarement ; ne cherchent pas le contact. Des types d'extrême gauche qui voyant mon badge « Volontaire François Hollande » détournent les yeux ; d'autres qui engagent facilement la conversation ; la tonalité générale est « ça ne va pas être facile, on en reparlera ». Des gens d'origine étrangère visible comme des tunisiens, tamouls ou autres sénégalais expriment (je parle d'échanges de trottoir en tête à tête, pas de slogans) expriment les tensions de leurs pays d'origine, expriment leur choix de la liberté, du changement, leur espoir que le changement en France facilite le progrès chez eux. On voit des femmes âgées qui ont soigneusement pris un petit sac avec une bouteille d'eau et disent qu'il y a des jours où il faut oublier ses rhumatismes. Un petit groupe de jeunes socialistes qui connaissent les chansons de la Commune qu'ils entonnent avec ferveur, plaisir et orgueil. Des gens d'Attac qui expliquent et argumentent. Marcher, chanter ou crier dans la rue ne change pas le monde ; ou pas assez, certes ; mais c'est aussi, pour beaucoup, un moyen d'exprimer ouvertement, une fois n'est pas coutume, ce que l'on ressent chaque jour et tait généralement. C'est aussi un moment où l'on adresse ou accepte plus facilement la parole, avec des inconnus, parce que l'on sait que l'on partage sans doute au moins quelque-chose avec eux, ne serait-ce que notre commune fragilité. Un moment où l'on sent une force partagée mais où l'on sourit aussi des voix de fausset, des accoutrements pas vraiment tendance, des démarches fatiguées, des jeunes filles fleuries, des grands baraqués qui respirent avec puissance, des nerveux dont le regard évoque un mélange d'incertitude et d'espoir. L'humanité. Plus exposée, plus ouverte que celle du métro aux heures de migration quotidienne.



Aucun commentaire: