La foire à l'outil à Bièvres était riche et
vivante, cette année encore. On y a même vu quelques amis
politiques, invités par notre Maire ; dont Maud Olivier. Eh
oui, il est possible de rester courtois, même entre adversaires politiques.
Le Trocadéro est-il plus grand que l'on croyait ?
Chiffres. On entend dire que les soutiens de
NS étaient deux cent mille place du Trocadéro, statiquement bien
sûr. Si vous regardez sur votre plan de Paris ou sur Google-maps la
surface de la place du Trocadéro, vous trouverez un cercle de moins
de cent mètres de diamètre, soit une surface de moins de huit mille
mètres carrés ; le parvis fait moins de 1,1 hectares,
l'ensemble fait donc moins de deux hectares, soit 20 000 mètres
carrés. S'ils étaient 200 000, cela fait plus de dix personnes par
mètres carrés. Ils ne devaient pas avoir froid. Ils n'ont surtout
pas froid aux yeux pour dire n'importe quoi.
La manifestation traditionnelle organisée par les syndicats
J'y suis allé ; pas comme toujours, mais comme
parfois, notamment lorsque les enjeux poussent à la mobilisation
plus que d'ordinaire.
Chiffres ? Ayant passé le plus clair de
mon temps sur un lieu de rassemblement du PS (près du Métro
Port-Royal) après être arrivé à Denfert, j'ai pu constater qu'à
seize heures, la Place Denfert-Rochereau était encore immobile et
qu'à dix-neuf heures, la queue de la manifestation (avec une
discrète présence policière et une majestueuse présence de
camions de nettoyage de la Mairie) était encore loin. Dans ma
modeste expérience, quand ça se passe de cette manière, il y a
nettement plus de cent mille personnes. Peut-être beaucoup plus.
J'entends dire plus de trois cent mille.
Ambiance ? Des corps abîmés, des corps
rayonnants, des corps ordinaires. Des visages calmes le plus souvent,
généralement avec une forme de joie – la joie de ne pas se sentir
seul, les manifs servent aussi à ça – reflétant souvent
l'espoir, souvent la détermination, parfois une tension.
Participants affichant une appartenance ou une
proximité politique ? Surtout des références aux
syndicats, mais aussi des références à des mouvements politiques
de gauche, parfois des références à des mouvements modestes mais
connus comme Attac ou Roosevelt 2012, parfois des mouvements de pays
en souffrance ou en espérance (l'un n'exclut pas l'autre) comme la
Tunisie, parfois des mouvements OVNIS, en tous cas pour moi.
Mots d'ordre ? Revendications : être
moins plumés, arriver en bon état à la retraite, se soigner, se
loger, égalité des genres/sexes. Slogans politiques aussi : du
genre Sarko casse-toi pour beaucoup, des François
Président (nettement moins), des chants, slogans ou des discours
racontant la casse sociale, d'autres exprimant la nécessité que
François Hollande, s'il est élu, ne déçoive pas, et ceci sur tous
les tons : évidents, craignant mais espérant, désabusés,
rageurs, convaincus ; et même appliqués.
Contacts ? On voit des habitants de
beaux quartiers traversés regarder les militants, rassemblements et
drapeaux de la CGT avec quelque effarement ; ne cherchent pas le
contact. Des types d'extrême gauche qui voyant mon badge
« Volontaire François Hollande » détournent les yeux ;
d'autres qui engagent facilement la conversation ; la tonalité
générale est « ça ne va pas être facile, on en reparlera ».
Des gens d'origine étrangère visible comme des tunisiens, tamouls
ou autres sénégalais expriment (je parle d'échanges de trottoir en
tête à tête, pas de slogans) expriment les tensions de leurs pays
d'origine, expriment leur choix de la liberté, du changement, leur
espoir que le changement en France facilite le progrès chez eux. On
voit des femmes âgées qui ont soigneusement pris un petit sac avec
une bouteille d'eau et disent qu'il y a des jours où il faut oublier
ses rhumatismes. Un petit groupe de jeunes socialistes qui
connaissent les chansons de la Commune qu'ils entonnent avec ferveur,
plaisir et orgueil. Des gens d'Attac qui expliquent et argumentent.
Marcher, chanter ou crier dans la rue ne change pas le monde ;
ou pas assez, certes ; mais c'est aussi, pour beaucoup, un moyen
d'exprimer ouvertement, une fois n'est pas coutume, ce que l'on
ressent chaque jour et tait généralement. C'est aussi un moment où
l'on adresse ou accepte plus facilement la parole, avec des inconnus,
parce que l'on sait que l'on partage sans doute au moins
quelque-chose avec eux, ne serait-ce que notre commune fragilité. Un
moment où l'on sent une force partagée mais où l'on sourit aussi
des voix de fausset, des accoutrements pas vraiment tendance, des
démarches fatiguées, des jeunes filles fleuries, des grands
baraqués qui respirent avec puissance, des nerveux dont le regard
évoque un mélange d'incertitude et d'espoir. L'humanité. Plus
exposée, plus ouverte que celle du métro aux heures de migration
quotidienne.
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